Paru dans &Co! : Dans les habits d’un Robin des Bois moderne…
La Fabrique travaille le bois et casse les codes de l’ébénisterie traditionnelle. Ici, on partage la richesse et on limite l’impact de l’activité sur la planète.
À Francheville, chemin du Torey, le nom tout simple de cette ébénisterie atypique, La Fabrique, s’écrit en lettres blanches sur une façade d’acier noir. À l’intérieur, le bois règne en majesté et emplit l’espace de son odeur. Vingt-quatre personnes s’affairent dans l’atelier et les bureaux, dont une douzaine d’ébénistes dédiée à la réalisation des commandes : mobilier pour particulier, pièces d’artiste, aménagements intérieurs pour des entreprises, hôtels, restaurants, et même des meubles liturgiques. Lorsqu’en 2008, Fabrice Poncet et son associé Nicolas Autric, lancent La Fabrique, ils entendent répondre à une aspiration profonde : créer des emplois manufacturiers en France adaptés à des personnes éloignées de l’emploi. « Nous ne sommes pas une entreprise d’insertion, mais une société privée inclusive, qui déploie des dispositifs d’accueil spécifiques en fonction du nouvel arrivant, précise Fabrice Poncet. Une très grande majorité de nos collaborateurs n’auraient certainement pas réussi à entrer dans une structure conventionnelle, en raison de leur handicap ou de leurs parcours d’emploi ». À l’épreuve de quelque 15 ans d’expérience, la réussite est au rendez-vous : un carnet d’ordres toujours rempli et un chiffre d’affaires qui dépassera encore les 2 millions d’euros en fin d’année. Fabrice Poncet est un pragmatique qui aime travailler de ses mains pour produire des objets de belle facture et à l’épreuve du temps ; un rebelle qui ambitionne de mettre une claque aux outrances consuméristes de la société et surtout un entrepreneur qui assume ses choix. Ici, un accord d’intéressement égalitaire partage la richesse. Ici, les rémunérations s’étirent sur une échelle de 1 à 5. Ici, les salaires ont augmenté de 7,8 % sur les 12 derniers mois. « Nous ne cherchons pas à payer les gens mieux qu’ailleurs, car on n’attache pas avec de l’argent, précise le dirigeant. Mais nous sommes attentifs à bien vivre ensemble, sans oublier que nous sommes tous là pour produire ! ». La Fabrique, qui s’approvisionne à 95 % en France, veille à réutiliser ses chutes de production ou à utiliser des matériaux de récupération. Elle a même organisé une cabane à chute où les voisins viennent quérir du bois. Sur la base du bilan carbone effectué récemment, l’enjeu est de passer de 460 tonnes équivalent CO2 par an à 400 tonnes en 2025 et à 340 tonnes en 2030. Des investissements sont en cours pour moderniser le centre d’usinage à commande numérique et changer l’isolation de la toiture, avec pose de panneaux photovoltaïques, ainsi que pour améliorer la circulation de l’air dans l’atelier. « Notre projet, conclut le patron, est de montrer qu’une entreprise de taille moyenne peut faire le job aux plans social et environnemental d’une manière résiliente ».
Do it your self
À la Fabrique d’en face
Jamais à court d’idées, la Fabrique a investi un nouveau bâtiment, juste en face de l’atelier historique, pour partager sa passion du bois. Ce lieu est ouvert au public et aux séminaires d’entreprise dans le cadre de workshops, d’ateliers Do it yourself et de formations. Chaque année, plus de 350 personnes sont initiées à l’art du meuble, de l’ébénisterie et de la fabrication numérique.
Un portrait signé Nancy Furer, à retrouver dans &co ! n°1 de décembre 2022